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L’axe michaélique en Occident

Cet axe regroupe 5 des 7 sites de l’axe connu sous le nom d’ “épée de saint Michel”

https://www.la-croix.com/Religion/mont-saint-michel-millenaire-sanctuaires
https://fr.aleteia.org/2017/05/26/7-sanctuaires-dedies-a-saint-michel-archange-unis-par-un-fil-direct/

Le premier sanctuaire dédié à l’archange Michel en Occident est celui du Mont Gargan en Italie. Le culte de saint Michel est de tradition byzantine et il est vénéré au Mont Gargan depuis le milieu du Ve siècle, c’est-à-dire lorsque s’effondre l’Empire romain d’Occident. Le lien le plus célèbre et le plus explicite est celui qui lie le Mont Gargan au Mont Saint-Michel en Normandie, que la tradition situe au début du VIIIe siècle (708-709). D’un point de vue historique, c’est l’origine de l’axe michaélique en Occident, illustré par le périple (708-709) des “envoyés mandatés par Aubert” (Revelatio, VI).
Car, toujours selon le texte de la Revelatio (V et VI), l’évêque Aubert, ne cessait de se tourmenter en constatant qu’il ne disposait pas de reliques du saint archange, le bienheureux Michel l’engagea à envoyer sans délai des frères au lieu où l’on honore avec vénération le souvenir du très saint archange sur le Mont Gargan et à accueillir avec une reconnaissance extrême les marques de bénédiction qu’ils rapporteraient sous son patronage.

Cependant les envoyés mandatés par Aubert arrivent à destination ; accueillis avec la plus grande bienveillance par l’abbé du lieu (…) ils font connaître (…) les raisons de leur venue (…). Après quoi, on retira avec la vénération qui convenait des reliques de l’endroit où le bienheureux archange avait chargé les fidèles de célébrer le souvenir de sa personne, à savoir un morceau du petit manteau rouge que l’archange avait déposé lui-même au Mont Gargan sur l’autel qu’il avait dressé de ses propres mains ainsi qu’un fragment du marbre sur lequel il s’était tenu et qui conserve aujourd’hui encore en ce lieu les traces de son pied, l’abbé remit aux frères les gages de protection pour qu’ils fussent rapportés au lieu consacré, sous la condition expresse qu’un même lien de charité unît éternellement ceux qu’une même révélation angélique avait réunis.”

Basilique Saint-Michel-Archange à Monte Sant’Angelo, fondée en 492 sous le pontificat de Gélase Ier

On peut évidemment s’étonner du grand empressement manifesté par un sanctuaire fondateur à se défaire de ses précieuses reliques au bénéfice d’un sanctuaire concurrent qui n’existe pas encore… Mais ce qui importe, c’est que le texte montois (rédigé probablement au IXe siècle) revendique sa filiation avec le Mont Gargan. Et comme il suffit de 2 points pour tracer une droite, le fait est que nous l’avons. Elle est orientée du SE vers le NO, cap 300°, ce qui correspond à la position du soleil couchant au moment du solstice d’été (21 juin). : fête de la Saint-Jean et non de la Saint-Michel…

Le Saint Michael’s Mount en Cornouailles est un troisième jalon intéressant. Sans preuves archéologiques avérées, “on rapporte qu’un monastère celtique (dédié à saint Michel) se serait développé sur le rocher du VIIIe au XIe siècle” (Wikipédia) : une chronologie compatible avec celle du Mont Saint-Michel avant ou à l’aube de la Normandie. Pour la suite, c’est une histoire normande : île offerte aux moines bénédictins du Mont Saint-Michel au XIe siècle par le roi d’Angleterre Édouard le Confesseur (1042-1066) pour que les moines y construisent une abbaye. Ou bien donnée à l’abbaye normande par Robert de Mortain, demi-frère du roi d’Angleterre Guillaume le Conquérant, quelques années plus tard. Et en 1135, l’abbé Bernard du Bec du Mont Saint-Michel en Normandie y fit construire l’église actuelle et le prieuré.
Là encore une connexion avérée et explicite d’un point de vue factuel et historique, mais rien sur l’étrangeté de l’alignement de ce 3e point sur la droite formée par les 2 premiers. Même si l’on devine que les marins, longtemps avant l’invention de la boussole et de l’astrolabe nautique, savaient par d’autres moyens tracer une route pour atteindre un point sur la terre. Autre étrangeté ou coïncidence amusante : cet axe est comme gravé dans la pierre sur le Mont lui-même. Avec les moyens actuels de la cartographie numérique (en l’occurrence Google Earth), il est assez simple de vérifier que l’axe michaélique se retrouve dans l’axe correspondant à la ligne tracée par les 2 points suivants : le point marquant le centre du porche de l’ancienne abbaye romane et le point de la chapelle d’Aubert. En d’autres termes, la ligne passant par l’ancienne entrée de l’abbatiale romane (détruite à la suite de l’incendie de 1776) et la chapelle Aubert située en contrebas mènera directement le navigateur à Saint Michael’s Mount en Cornouailles. Étonnant, non ?

La ligne qui relie porche roman de l’abbaye / chapelle Saint-Aubert se superpose exactement à la ligne de l’axe michaélique qui pointe exactement vers Saint Michael’s Mount en Cornouailles (et vers le sanctuaire du Monte Gargano dans l’autre direction).

Le St Michael’s Mount en Cornouailles

Le 4e point vers le NO est éperon rocheux situé au large des côtes sud-ouest de l’Irlande : Skellig Michael (péninsule d’Iveragh, comté de Kerry, Munster). Une première installation de moines possible au VIe siècle. Site abandonné au XIIIe siècle. Inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1996 sous le nom Skellig Michael : un nom qui apparaît en 1044 dans un texte intégré au recueil Annales du royaume d’Irlande. Un édifice roman (XIIe siècle) cité par Giraud de Barri dans sa Topographia Hibernica (1188). Concernant les édifices antérieurs (fin du VIIIe siècle ?), ils présentent une particularité intéressante qui rappelle des données architecturales fournies dans la Revelatio pour décrire la forme du 1er sanctuaire édifié sur le Mont au VIIIe siècle : “(Aubert) apprit par des réponses (de l’ange) qu’il devait prendre pour mesure de la construction l’espace circulaire qu’il verrait piétiné par le taureau (…). Il fit donc construire un édifice qui (…) présentait une forme circulaire à la manière d’une grotte .”
Revelatio, IV-2 et V-1.

Les beehive huts (en irlandais : clochán), les cellules dont la construction est souvent attribuée aux moines. Wikipédia.

Un 5e point est également lié à cet axe, à la fois par sa dédicace et par son époque : la Sacra di San Michele (abbaye Saint-Michel-de-la-Cluse) près de Turin, située à mi-chemin entre le Mont Gargan et le Mont Saint-Michel en Normandie. L’abbaye est fondée vers 985, soit une vingtaine d’années après la fondation de l’abbaye bénédictine normande (965-966) et elle se situe sur un passage emprunté depuis l’Antiquité pour relier la plaine du Pô à la vallée du Rhône :

Un point de passage emprunté depuis l’Antiquité, entre plaine du Pô et vallée du Rhône : site de la Sacra di San Michele, situé à mi-chemin entre le site du Monte Gargano et le site du Mont-Saint-Michel en Normandie.
Sacra di San Michele, photo Elio Pallard, 2014 (Wikipédia)

En résumé :

  • Une origine en Occident : le Mont Gargan à la fin de l’Antiquité (fin du Ve siècle)
  • Une extension occidentale à partir du VIIIe siècle : le Mont Saint-Michel
  • Une consolidation “bénédictine” fin Xe – début XIe siècle.
  • Une orientation SE-NO (environ cap 300°) qui peut être liée au solstice d’été (mais alors sans rapport avec l’archange Michel, mais assurément avec Apollon, qui n’est pas sans lien avec Michel… à suivre).

>> frise chrono :

par Jean-François Guillou, avec le site frisechronos.fr

Pour conclure : le sujet traité par mysteria (Youtube)

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